Aujourd'hui avait été une journée bien remplie, il avait reçu le chef d'un groupe de rebelle dans le grand salon dans lequel ils étaient entretenus sur les termes d'une alliance pendant trois bonnes heures sans faillir. La discussion au final ne donna rien à part quelques verres de siphonnés rien n'avait changé au manoir. Mondo arborait un air terrible qui cachait sa profonde déception. Ils devraient vite tenter quelque chose de plus concret. Passant la main sur sa barbe, il tentait de rassembler des idées, des alliés. Comme la frustration l'avait animé toute cette fin d'après midi, il ne fit pas une pause. Il convoqua des membres de la Famiglia pour leur donner des directrices : ils devaient se rendre à Arte. Après avoir dit à chacun la mission qui leur incombait, les avoir salués et les avoir laissés quitter le salon confiant, Mondo sentit son coeur se serrer, non pas par tristesse ou inquiétude. Mondo avait confiance en chacun d'entre eux. Non, c'était encore cette douleur atroce qui le mortifiait toujours plus, de façon toujours plus intense. Il plaça sa main contre sa poitrine en souriant, puis commença à se trainer le long des couloirs sans appeler personne. Son mal c'était comme un secret entre lui et certaines personnes de confiance, aussi ne voulait-il pas en faire un étalage. Ce n'était pas le moment. Assurément non.

Atteignant enfin sa chambre, il se rendit vers son bureau pour écrire une lettre avec toutes ses idées pour que quelqu'un prenne la suite s'il venait à perdre connaissance. Il se mit à tousser, de cette voix forte et rauque qu'il tenta de dissimuler. Son corps glissa presque tout seul de la chaise pour se retrouver contre le sol. Gémissant, il observa la porte qu'il avait pris soin de fermer pour ne pas se donner en spectacle pour le couloir. A sa toux succéda une respiration sifflante comme si son souffle cherchait à se faire moins présent. Il était là dans un beau costume brun allongé au sol, son corps tendu dans l'incapacité de bouger... Mondo ferma les yeux... Cette vue pouvait effrayer, mais il sentait qu'il ne perdrait pas connaissance. En revanche, il était très fatigué.... Alors il laissa son corps inanimé au sol le temps qu'il puisse à nouveau bouger. Il n'avait pas été prudent semblait-il, en fait non il savait qu'il arriverait à cette issue. Juste, il aurait aimé pouvoir atteindre le lit tout de même, mais il était rassuré que ce n'était que de la fatigue. Ses suppositions étaient vraies sans l'être et c'était bien là qu'il s'était trompé. Sa crise allait être plus longue que prévu... mais il était bien loin de se constat quand il garda ses yeux clos. Les rideaux tirés de la chambre du couple leader de l'Arcana laissait passer la lumière craintive de la lune. Rien n'avait bougé ou presque tout comme cet après-midi, si ce n'était ce mot inachevé de Mondo qui se terminait sur un " et puis ensuite. Il n'avait pas pu écrire la fin quand il s'était décidé à lâcher prise.

La journée s'était déroulée sans trop de surprise et d’anicroches. Je m'étais occupée de quelques tâches ménagères, ayant pour habitude d'entretenir certaines choses moi-même. S'adonner à ce genre d'activités paisibles et rassurantes me permettait de passer dans une sorte d'état second. De ne penser à rien, d'effectuer un mouvement répétitif sans me soucier de quoique ce soit.
Puis j'étais passée à la serre, arroser les plantes qui en avaient besoin, soigner celles qui étaient malades... Exécutant sans émettre le moindre mot ni le moindre son, les activités quotidiennes qui m'incombaient. Après les passes-temps, ce fut l'heure de dîner. Tous les membres de l'Arcana avaient mangé dans une ambiance plutôt festive, comme à chaque fois. Et même si les rires et les sourires se répétaient, je ne m'en laissais pas, jamais. Ils sont beaucoup trop précieux à mes yeux. Même si Mondo riait lui aussi, j'avais l'impression que ce n'était qu'à demi. Comme s'il songeait à tout autre chose et que pourtant, il faisait l'effort d'être présent. Au début, sachant que mon mari était un homme fort occupé et arborant souvent cette petite mine pensive, je ne m'en suis pas inquiétée. Je savais qu'il devait converser pour parvenir à une alliance dans quelques heures, me suis dit que c'était sans nul doute la raison de tout ceci. Je m'étais alors promise de m'occuper de lui le soir venu, d'être sa confidente s'il voulait parler, de le prendre dans mes bras pour partager ma chaleur et lui transmettre mon amour s'il en avait besoin... Cette idée en tête, rassurée, j'étais partie m'occuper de mes propres affaires.

Quand le soir est arrivé, je n'étais pas encore rentrée au manoir, il me restait quelques petites choses à finaliser et j'espérais que cela pourrait éveiller un sourire sur le visage de mon tendre Mondo. Un bouquet de ses fleurs préférées à la main, je rentrais alors en voiture paisiblement, le cœur léger.
Les couloirs de la bâtisse, vidés de toute forme de vie avec l'arrivée de la lune dans le ciel, m'offrent un certain sentiment d’oppression, d’appréhension. J'ai l'impression qu'il fait plus sombre que d'accoutumée. Seuls mes pas raisonnent à une rythme régulier, me permettant de ne pas craindre le silence total. C'est comme si tout le monde était partit, comme si toute cette journée et toutes ces existences n'avaient prit vie que dans mon esprit. C'est une sensation, très désagréable.
J'accélère donc, préoccupée par le fait que personne ne soit venu m'accueillir, même pas mon mari, alors qu'il ne manque jamais à l'appel, pas une seule fois. Je dois me battre contre ma propre personne pour ne pas courir, pour ne pas céder à une sorte de panique, alors que j'imagine sûrement le pire comme toujours. Peut-être est-il simplement en train de dormir, après tout, ses journées sont bien remplies.
J'ouvre la porte de notre chambre avec une certaine précipitation. Le bouquet de fleurs au parfum entêtant que je tenais dans ma main, se retrouve à décorer le sol. Dans le noir, je ne vois pas distinctement son visage. Mais je reconnais son costume, sa barbe, la forme de son corps et celle de son visage... Mon cœur bondit dans ma poitrine en un instant, je me précipite à son chevet. Je pose ma main sur son front, pour savoir s'il a de la fièvre, attrape son poignet pour être certaine qu'il est toujours là, que son cœur bat toujours au creux de sa poitrine. Je sens son pouls, mais il ne me parait pas normal.
Je caresse son visage, arrange ses cheveux pour qu'aucun ne retombe sur son front, me mord la lèvre inférieure et tente d'apparaitre la plus calme possible, mais c'est peine perdue